Ecrit le vendredi 21 janvier 2011 à 13:19 par Sylvain.

Dans la même rubrique :

• le finish vers la frontiere
• les tribulations d'un pariah
• La formidable vallee de Romit

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Tadjikistan, premier acte

Nouveau pays et a nouveau pas mal de contrastes avec le precedent. Quand on entre au Tadjikistan, par la vallee centrale du moins, on s’appercoit que la population est differente, ethniquement parlant, de celle rencontree jusque la en Asie centrale. La ou la population ouzbeque ou turkmene est dite turco-mongole avec quelques minorites russes, celle des environs de Dushambe est manifestement persanne comme les iraniens. La ressemblance avec l’Iran ne s’arrete pas la: le drapeau tadjik est quasiment identique a l’iranien (il n’y a que le logo central qui change) et la religion musulmane est tres pratiquee (en tout cas bien plus qu’en Ouzbekistan ou on peut faire + de 100km sans croiser une mosquee) par exemple. D’ailleurs tous les hommes d’un certain age se laissent pousser un long collier de barbe.

Ca faisait longtemps que je n’avais pas vu une pareile demonstration de pilosite, a part la mienne ! Premier changement radical avec l’Ouzbekistan, ici les gens me foutaient la paix. Fini les gens qui vous sautent dessus tout les 100m pour vous poser incessamment les memes questions quand bien meme vous etes en train de manger. Je pouvais m’asseoir au centre d’un village sans que personne ne m’aborde, juste des salutations. Un vrai bonheur ! J’etais toujours un objet de curiosite incontournable mais j’avais retrouve la tranquilite. Ma premiere priorite etait de rejoindre Dushambe a moins de 3 jours de marche depuis la frontiere. Une fois sur place je devais verifier les maigres informations en ma possession sur le pays pour valider mon itineraire futur meme s’il y avait peu de chance pour que j’abandonne mon plan initial. En attendant, mes premiers jours au Tadjikistan m’auraient apporte au moins 2 faits marquants. Le premier jour, alors que je venais de franchir la frontiere 1h plus tot et que je commencais a ranger dans mon sac les quelques courses effectuees dans un commerce, un type anglophone m’abordait et m’invitait a manger gratis dans son resto. Ca faisait plaisir car il y avait tres longtemps que je n’avais pas eu ce genre d’invitation, pas meme en Iran.

L’autre anecdote concernait ma 2eme nuit dans le pays: alors que j’appercevais a 5 ou 6 km les premiers batiments de Dushambe, je decidais de passer la nuit sur une petite colline apparement deserte qui surplombaient la ville. Passe un verger, je crus reconnaitre une bergerie abandonnee au sommet avant de distinguer un vehicule un peu bizarre parque a cote. Ma vue lointaine n’etant pas tres bonne, je prennais une photo avec le zoom au taquet pour en avoir le coeur net. Ce n’etait pas un tracteur mais un camion lance missile avec dans ses rampes 2 enormes ogives pointees vers le ciel. J’etais a une centaine de metre a decouvert d’une base anti-aerienne secrete et je prennais des photos comme un con ! L’heure etait plutot tardive et les emplacements pour dormir etant plutot rares a l’exception de la colline je decidais neanmoins de dresser ma tente planque dans un fourre. Dans le doute j’effacais la photo du lance missile, histoire qu’on ne me colle pas une accusation d’espionnage au cul si les militaires m’avaient repere. En tout cas il semble que personne ne m’ai repere ce soir la car j’ai passe une nuit fort tranquille.
Par la suite, j’allais passer 3 jours forts agreables a Dushambe chez un couple de francais, Nicolas et Ilona, contactes sur Couchsurfing. Pour la petite histoire, ils louaient une maison dans le quartier hyper VIP de Dushambe car les demeures voisines n’etaient ni plus ni moins que celle du president de Tadjikistan en personne (vue imprenable sur la barraque a moins de 50m) ou bien celle du directeur des services secrets entre autres !

En tout cas je m’etais resolu a traverser le pays comme prevu, a savoir plein nord-est vers le Kirghizistan, meme si j’etais loin d’avoir toutes les certitudes necessares. En meme temps, je n’avais pas vraiment le choix: il y a 3 postes frontieres entre le Tadjikistan et le Kirghizistan, celui tout au nord debouche sur une des regions les plus instables du Kirghizistan (deja qu’il y a eu la revolution il y a peu !) avec en sus des enclaves ouzbeques entourees de mines sur le trajet tandis que celui tout a l’est, du fait des tres imposants reliefs du pays et de la saison (le printemps) imposait un tres long detour sur la “Pamir Highway” (qui longe la frontiere afghane vers le sud avant de repiquer vers le nord) impossible a realiser a pieds en moins d’un mois sachant qu’il faut egalement un permis GBAO long et couteux a obtenir par dessus le marche ! Je n’allais pas choisir la facilite pour autant car la vallee de Rasht que je comptais emprunter etait reputee pour son instabilite (en gros il y aurait encore des types armes qui foutent la merde) et des champs de mine un peu partout et surtout parceque le poste frontiere que je visais etait interdit aux etrangers. Embêtant tout de meme. Cela dit, j’etais en Asie centrale et je me disais que je pouvais toujours soudoyer les douaniers en dernier recours. La cerise sur le gateau: l’enregistrement a l’OVIR. Et oui, cette saloperie qui m’a pourri l’existence en Ouzbekistan est de vigueur ici aussi quoique moins contraignante meme si la reglementation est tout aussi floue. Auparavant il fallait seulement s’enregistrer le 3eme jour en dormant dans un tres couteux hotel accredite ou en passant par une tout aussi couteuse agence de  voyage mais desormais il ne fallait s’enregistrer qu’a partir du 29eme jour. Évidemment, j’avais un visa de 31 jours et je ne pouvais pas y couper pour etre dans la legalite … Mais comme précédemment, j’entendais bien faire l’impasse la dessus a nouveau meme si ca rajoutais fatalement un peu plus de pression supplementaire quand j’allais me presenter au poste frontiere.
En attendant, mon trajet au Tadjikistan me permettait un timing assez souple et j’avais prevu de marcher la premiere semaine dans la vallee de Romit, zone protegee et donc sauvage. Nicolas m’avait passe des copies de tres bonnes cartes topographiques russes et j’etais fin pret a decouvrir les montagnes du Tadjikistan.