Ecrit le vendredi 21 janvier 2011 à 12:08 par Sylvain.

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Premiers pas en Asie centrale

petite introduction dans cette region si particuliere et si riche en contraintes ...

Apres bientôt pres d'un mois consacre aux demarches consulaires pour obtenir mes prochains visas a Teheran et d'un peu de «tourisme» dans le centre de l'Iran, j'attaque pour de bon le premier de la serie des «stans», et le plus gratine en l'occurrence: le Turkmenistan. Ce pays n'est qu'une etape, que dis-je, une escale. En effet je n'ai qu'un visa de transit de 5 jours, obtenu peniblement dans la capitale iranienne, et pour le coup il n'est pas question de marcher. Le probleme etait connu d'avance tant le Turkmenistan est un pays ferme a la limite de l'autisme. En terme de difficulte, le visa turkmene se situe entre la Bielorussie et la Coree du Nord c'est dire ! A vrai dire ca ne m'enchantait guere de traverser un pays en transport motorise mais l'unique parade pour gagner l'Ouzbekistan consistait a traverser la mer Caspienne en bateau depuis l'Azerbaidjan pour rejoindre le Kazakhstan. Au final, il fallait utiliser un transport en commun, qu'il soit routier ou naval … Au moins j'aurai eu l'opportunite de decouvrir ce formidable pays qu'est l'Iran. L'autre option consistait a passer par le Pakistan ou l'Afghanistan mais la je partais directement au casse-pipe !
Voyager a pied en Asie centrale est un exercice difficile, la liste des contraintes est interminable: les obligations d'un pays entrainent des consequence sur la maniere d'aborder le prochain tout comme celles de ce dernier vous contraignent d'ores et deja a vous adapter dans le precedent ! Un vrai casse-tete, enumerer toutes les emmerdes qui me pend au nez en Asie centrale prendrait des pages. Pour ne citer que les plus importantes, il y a dans un premier temps les visas a obtenir et c'est deja en soit un vrai boulot qui demande beaucoup de patience, enormement de temps et pas mal de fric (3 semaines pour ceux du Turkmenistan, Ouzbekistan et Tadjikistan). Ensuite il y a la duree du sejour que les consulats ou consenti a vous donner et la non plus il ne faut pas s'attendre a beaucoup de cadeaux d'autant plus que les dates d'entrees et de sorties sont fixees au jour pres. Vous devez bien entendu adapter votre itineraire en fonction des postes frontieres entre chacuns des etats qui ne sont pas vraiment nombreux et qui sont quelque fois fermes ponctuelement voire definitivement aux etrangers. Il y a egalement le decoupage si particulier des frontieres entre l'Ouzbekistan, le Tadjikistan et le Kirghizistan en depit des reliefs et de la repartition ethnique qui vous contraignent a un itineraire complexe (et je ne parle pas des enclaves et des zones minees !). Vous devez aussi composer avec la politique de flicage des etrangers heritee de l'ex-URSS que la plupart de ces etats peu democratiques ont decide de conserver pour occuper leur hordes de fonctionnaires charges de la «securite» et pour soutirer toujours un peu plus de pognon a leurs visiteurs … autant dire que les vagabonds ne sont pas les bienvenus ! En Ouzbekistan par exemple, il est necessaire pour ne pas enfreindre la loi de dormir tout les soirs a l'hotel a cause de leur politique d'enregistrement a l'OVIR ! J'ai eu une longue correspondance par mail avec une agence touristique ouzbeque pour obtenir des precisions et il y a vraiment de quoi se taper la tete contre les murs: il y a la loi, l'interpretation qu'en fait la police et la corruption ambiante par dessus le marche ! Aussi les considerations financieres necessitant une escale dans une capitale pour retirer du fric dans un ATM qui veuille bien accepter votre CB, surtout lorsqu'on sort d'un sejour de 3 mois en Iran ou votre carte est completement inutile. Enfin il y a le visa chinois a gerer et il n'est aise a obtenir partout, le choix de la capitale est vital pour s'eviter un veritable parcours du combattant et une trop grosse perte de temps. Pour faire simple et sans rentrer dans les details voilà une partie des rejouissances qui m'attendent (ce n'etait qu'une ebauche, il y en a bien d'autres parfois plus vicieuses) pour les prochains mois.
En attendant je suis entre au Turkmenistan et c'est deja toute une aventure. Bien qu'ayant fini ma marche a Sarakhs, le poste frontière entre l'Iran et le Turkmenistan le plus oriental, j'ai choisi d'entrer par celui de Bagjiran pres de 500 km plus a l'ouest. En effet ce poste, bien que paume au milieu de nulle part au sein des montagnes frontalieres, est a quelque 30 km au sud d'Ashgabat et est le point d'entree obligatoire pour qui veux aller dans la capitale. Mon visa turkmene est un transit, traduction: je suis juste sense traverser le pays pour rejoindre le suivant et il est impossible de se rendre ailleurs que sur l'itineraire le plus direct entre le poste frontiere d'avec l'Iran et celui d'avec l'Ouzbekistan. J'ai besoin de tirer de la thune dans l'unique distributeur de billets du pays qui accepte les Mastercards et il est a Ashgabat …
Cote iranien les choses etaient presque simple: j'ai du negocier pendant 1h la veille avec les flics de la frontiere pour obtenir le droit de planter ma tente dans les collines environnant le petit bled de Bajgiran et eviter qu'une escouade nocturne ne me rende visite pour l'occasion. Passe ce contre temps, RAS. Le passage du poste iranien de sortie est presque une formalite meme s'il y a fouille systematique des bagages. Dans mon cas le type a laisse tomber au bout de 30 secondes en poussant un soupir en constatant le bordel dans mon sac avec mon systeme de rangement facon poupees russe puissance 10 (en gros: pleins de sacs plastiques qui contiennent pleins de petits sacs plastiques, qui eux-meme contiennent … etc). J'avais lu dans un Lonely Planet qu'il etait bien plus interessant de changer son fric en devises turkmenes a la frontiere cote iranien ou alors au black a Ashgabat qu'aux banques ou qu'aupres des changeurs officiels qui soit disant appliquaient un taux hyper defavorable. Je me dirige donc a la guitoune de change iranienne avec un peu de blé en main et d'autres billets en poche. Sauf que le type me sort des nouveaux Manats tout beaux, tout neufs et re-evalues et tout mes reperes etaient perdus (j'avais trouve sur internet le taux de change auparavant mais avec l'ancienne monnaie). Dans le doute je ne change que mes derniers Rials iraniens (a peu pres 40$). Apres coup j'apprendrais qu'il m'avais nique de pres de 10% de la valeur … ne jamais faire confiance aux changeurs de frontiere, tous des voleurs ! Cote turkmene ca m'aura pris pres de 2h. Premiere etape, il faut faire la queue pour payer la taxe d'entree de 12$ en echange d'un bout de papier tamponne. Je n'ai pas de monnaie et je paye avec un billet de 50 … et la preposee me rend 33. Ca commence deja ! Je proteste gentiment avec le sourire et elle me rend 5$ de suite, petite futee va, faut pas me prendre pour un con non plus ! Apres cela, a nouveau la queue pour recevoir le tampon sur le visa puis une autre pour passer les bagages aux rayons X. Comme au poste iranien, l'officier des frontieres abandonnera la fouille de mon sac presque aussitôt apres l'avoir ouvert. Puis ca sera la derniere etape et non des moindres: du poste turkmene jusqu'à l'entree officielle du territoire, il y a un no man's land de 25 km qu'il est impossible d'arpenter a pieds. Il y a des minibus qui font la navette mais a l'annonce du tarif je manque de m'etrangler: 20$ bordel, pour moitie moins de ca j'avais pris le bus pour aller de Mashad a Teheran (pres de 1000 km) ! Apres d'interminables tractations avec plusieurs chauffeurs je reussis a negocier le voyage a 12$ mais malgre tout la pillule a du mal a passer … il commence a me couter cher ce foutu pays ou je ne fais que passer !
Epilogue: le soir meme je deambule dans les rues d'Ashgabat pour me dégourdir les jambes et jeter un oeil a la ville. Tandis que je traverse un tunnel sous un boulevard je m'allume une cloppe. Je sais qu'il est interdit de fumer a l'exterieur dans le pays et que les flics peuvent m'aligner pour ca (en fait lorsque l'ancien apparatchik, president puis dieu vivant du Turkmenistan Niazov a du s'arreter de fumer suite a des problemes de sante, il a juge necessaire que tout le pays en fasse autant …). A peine ai-je le temps de tirer une latte qu'une porte s'ouvre sur le cote du tunnel et que 2 types avec des talkie-walkies m'interpellent aussitôt. Des flics bordel ! Ils me montrent leurs cartes et reclament mon passeport, manifestement ils ne parlent que le russe et le turkmene, langues que je suis a meme de comprendre en partie. Bien entendu je ne parle qu'en francais et fait mine de ne rien comprendre quand ils m'annoncent que je dois payer une ammende et les suivre dans le local planque dans le tunnel. Le dialogue de sourds dure plusieurs minutes et je m'appercois entre temps qu'ils baissent clairement la voix et essayent de dissimuler mon passeport a chaque fois que quelqu'un passe dans le tunnel. Alors qu'un petit groupe progresse lentement dans le passage, je saisis ma chance aussi sec: je commence a hausser le ton puis a gueuler en faisant de grands gestes pour que tout le monde me remarque. En moins de 10 secondes l'affaire etait pliee: mon passeport rendu et l'ammende «annulee» …
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